L’affaire Roselande Bélony : Un drame qui révèle l’urgence de légiférer sur la cybercriminalité en Haïti
Le nom de Roselande Bélony restera à jamais gravé dans la mémoire collective haïtienne comme celui d’une jeune femme injustement brisée par la cruauté numérique. Victime de la diffusion non consentie de vidéos intimes sur les réseaux sociaux, Roselande a été exposée à une vague de honte publique, de harcèlement et de stigmatisation sociale qui l’a poussée au désespoir. Cette tragédie bouleversante soulève une question centrale : jusqu’à quand Haïti tolérera-t-elle le vide juridique autour de la cybercriminalité ?
Tout a commencé lorsque des vidéos personnelles de Roselande ont été publiées sur les réseaux, sans son autorisation. En quelques heures, les images ont circulé massivement sur Facebook, WhatsApp, TikTok et d’autres plateformes, provoquant un torrent de commentaires haineux, sexistes et humiliants. Loin de s’arrêter là, des internautes se sont lancés dans une chasse virtuelle, alimentée par des rumeurs et des propos diffamatoires. Roselande a été jugée, condamnée, et détruite publiquement — sans jamais pouvoir se défendre.
Ce qui s’est produit n’est pas un fait divers isolé. En l’absence de lois claires en Haïti pour protéger les individus contre la violence numérique à caractère sexuel, de plus en plus de femmes deviennent des cibles. Le phénomène est connu ailleurs sous le nom de “revenge porn”, et dans plusieurs pays, il est puni par la loi. Mais en Haïti, les victimes comme Roselande sont abandonnées à elles-mêmes, sans recours légal efficace.
La justice haïtienne manque cruellement de mécanismes pour identifier les auteurs de ces actes, les poursuivre et les punir. Il n’existe aucune structure spécialisée pour les enquêtes numériques, aucun système de protection juridique des victimes de publication non autorisée de contenus privés, et surtout aucune loi qui criminalise explicitement ces comportements.
Le drame de Roselande Bélony doit marquer un tournant. Il est temps que les parlementaires, les juristes, les défenseurs des droits humains et la société civile exigent : Une loi complète contre la cybercriminalité, incluant la protection de la vie privée et la criminalisation de la diffusion non consentie de contenus sexuels ;la création de brigades spécialisées en cyber-enquêtes au sein de la police judiciaire et des campagnes de sensibilisation dans les écoles, universités et sur les médias pour éduquer la population à l’éthique numérique.
Ce n’est pas seulement la mémoire de Roselande qu’il faut honorer. C’est aussi la sécurité de toutes les autres jeunes femmes — anonymes, vulnérables, et exposées chaque jour au danger d’un clic malveillant — qu’il faut désormais garantir.
Justice pour Roselande ne signifie pas seulement condamner ceux qui l’ont détruite. Cela signifie changer les lois pour que jamais une autre vie ne soit ainsi sacrifiée.
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