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Quand Evelyne Sincère pleure sa mort et écrit à la jeunesse haïtienne

Pourquoi j’étais née sur cette terre maudite où je représentais qu’un simple objet aux yeux des dirigeants et ces malfrats qui m’ont ôté  la vie? Pourquoi je portais cette nationalité si mon existence n’avait aucune importance dans cette République avec laquelle j’étais si sincère? Pourquoi mon corps est souillé, humilié, maltraité, jeté sur des ordures malodorantes comme si j’en faisais partie… Alors que tout le monde reste chez soi et dénonce ma mort avec toutes ces hypocrisies?

Ils m’ont violé, malmené, humilié, tué… comme si j’étais l’un des criminels les plus recherchés de cette République maléfique et je n’avais pas le droit à la vie.

Quel châtiment! C’est d’être né en Haïti.

Il y a trop de disparités sur la terre de mon origine. Trop de fossé entre les dominants et les dominés. Je ne faisais pas partie des privilégiés, je n’étais que la fille d’un pauvre nègre qui transforme de l’eau en beurre pour assurer sa survie. Mon père n’est pas de l’équipe qui pille et dilapide les fonts de l’Etat. Et il n’est pas non plus de l’équipe qui organise les crimes économiques et/ou politiques. Voilà pourquoi les instruments de cet état délabré – l’armée et la police – qui assurent la répression sur les gens qui réclament justice et la sécurité m’ont laissé humilié par des voyous qui ont souillé mon corps. Je suis victime de la passivité et complicité d’un Etat dirigé par des chefs insoucieux de leurs concitoyens. Ils ont tous été au courant de ma séquestration. Mais ils n’ont rien fait pour retrouver ma libération car j’étais de la classe défavorisée. Ancienne lycéenne, habitante du quartier de << Grand ravin>>, fille d’un prolétaire… À quoi servait mon existence? Je suis victime d’une exclusion sociale, des dirigeants ségrégationistes et d’une insécurité organisée.

À tous mes frères et soeurs opprimés, marginalisés, oubliés et rejetés comme moi de la terre d’Haïti. Que ma mort vous serve de stimulant nécessaire pour déclencher la vraie révolution contre l’impunité, l’insécurité, la misère, l’injustice, l’inégalité, la tyrannie, l’oppression, la marginalisation… Là où je suis, dans ma demeure en attendant mon jugement dernier. Je pleure ma mort car j’étais trop jeune, trop sincère et attachée à ma terre pour être victime d’une telle crime si odieuse.

Jeune, laissez-moi vous dire, cessez de croire dans ces dirigeants et ces leaders d’opposition insoucieux qui ne vont indigner de votre sort pareil que le mien que sur les réseaux sociaux. Ils ne sont que des mangeurs d’homme. Ils sont les vrais responsables de ma mort comme ils seront les principaux responsables de la vôtre. Indignez vous réellement de ma mort et du sort qu’ils vous ont réservé. Souvenez-vous de Grégory Saint-Hilaire, Lencie Mirville, Gana, Sebatien et tant d’autres jeunes qui ont subi des martyrs comme nous.

La jeunesse haïtienne, je vous parle. Vous êtes la force vitale nécessaire à votre liberté sur toutes ses formes. Vous qui croyez être libre pourtant vous ne l’êtes pas. Partout que vous soyez, vous saurez que la liberté va de paire à la sécurité. Sur cette terre, vous serez libre quand vous serez en sécurité. Je n’étais pas libre. Je vivais dans cette illusion de femme libre.

Vous, les jeunes femmes, cessez d’être les proies d’une catégorie de prédateurs sexuels qui ne font que vous exploiter sexuellement et bientôt qui seront votre assassins. Croyez en vous! En vous! Soyez des femmes indépendantes, productives, compétitives, positives et qui s’engagent dans la lutte pour la liberté dont je vous parle. Mes soeurs haïtiennes, sachez que vous vivez dans une société sexiste où la femme n’est réduite qu’à un simple objet sexuel. Sachez que pour eux nous avons que deux fonctions: celles du plaisir et de la maitresse de foyer. Oui, c’est ainsi que nos prédateurs nous voient dans cette société de machiste.

Alors, débarrassez-vous des débauches. Ne vous laissez plus instrumentaliser et luttez vous pour vos droits: à la vie, à la sécurité, à liberté d’expression, à l’autodétermination, à l’émancipation… Luttez-vous pour laisser une Haïti viable et vivable aux générations futures afin que nulle de nos arrières ne soit plus victime d’une telle barbarie.

Avant de vous laisser. Laissez-moi vous dire que je ne compte pas sur les autorités de cette jungle dénommée Haïti pour ma justice. Mais, allez me venger. Je crois en vous. Vengez Grégory Saint-Hilaire, Gana et tant d’autres jeunes compatriotes qui ont été humiliés, maltraités et tués comme des bêtes sauvage de cette République de merde.
Faites de cette terre un espace vital où la liberté, l’égalité et la fraternité trouveront leur vrai sens.

Que vous me rendiez justice!

 

Prof. Enock OCCILIEN 

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Lovelie Stanley NUMA

Lovelie Stanley NUMA, Journaliste Écologique et PDG Impulse WebMedias. Coordonnatrice Générale de l'association dénommée "Collectif des Journalistes Haïtiens Engagés pour l'Environnement (CoJHEE). La voix des sans-voix. Le journalisme utile c'est ma passion. Je travaille également pour des médias internationaux.