Madagascar: la hausse des cas de Covid-19 sème le doute sur la tisane “miracle”
Les sirènes des ambulances retentissent en permanence dans la capitale malgache Antananarivo, où les hôpitaux publics sont débordés et le palais des sports de Mahamasina vient d’être transformé en hôpital d’une capacité de 250 lits. Antananarivo connaît une forte augmentation du nombre de cas de Covid-19 malgré la distribution d’une tisane à base de plante présentée par les autorités comme un remède au virus, et des tensions éclatent au sein du gouvernement sur la stratégie à adopter.
La Grande Ile de l’océan Indien a dépassé mardi la barre symbolique des 10.000 cas, dont 93 morts. Le nombre de nouvelles contaminations quotidiennes varie désormais entre 300 et 400, contre une centaine environ il y a quelques semaines. Les autorités avancent plusieurs explications: “l’augmentation de la capacité de dépistage”, “la forte densité de population” à Antananarivo ou encore la non prise de la tisane, à base d’artemisia, vantée par le président Andry Rajoelina et largement distribuée à Madagascar et dans plusieurs pays, essentiellement africains.
Pratique d’un test nasal sur un patient au centre de santé Andohatapenaka d’Antananarivo le 20 juillet 2020
Cette tisane, appelée Covid-Organics ou CVO, a des vertus préventives et curatives contre le nouveau coronavirus, affirme le chef de l’Etat qui a inauguré ce week-end un hôpital de campagne. Mais aucune étude scientifique n’a à ce jour prouvé son efficacité. Quatre mois après l’apparition du premier cas de Covid-19 à Madagascar, les principaux hôpitaux d’Antananarivo croulent sous l’afflux de patients. “Le nombre de cas augmente de plus en plus, alors (…) on ne prend que les cas graves”, explique à l’AFP le directeur de l’hôpital Andohotapenaka, Nasolotsiry Raveloson.
Le ministre de la Santé lui-même, Ahmad Ahmad, a tiré la sonnette d’alarme la semaine dernière. La pandémie “évolue ces dernières semaines selon un mode très critique à Madagascar avec des flambées épidémiques importantes” dans plusieurs régions, dont Antananarivo, a-t-il prévenu dans une lettre où il sollicite l’aide de la communauté internationale.
Des lycéens posent avec une bouteille de Covid Organics au lycée J.J. Rabearivelo d’Antananarivo, le 23 avril 2020
“Pour voir si le CVO marche, il suffit de voir le nombre de cas“, constate Mirato Rabearson Mahefamanana, un médecin généraliste. “Pourquoi y en a-t-il autant actuellement ?”. Paul Rabary, ancien ministre de l’Education, affirme avoir pris scrupuleusement sa tisane et a malgré tout contracté le Covid-19. “J’ai consulté quatre médecins privés et aucun d’eux ne m’a prescrit le Covid-Organics pour mon traitement“, raconte-t-il à l’AFP. “Si par malheur j’attrape cette maladie, je préfère être pris en charge par des médecins qui n’utilisent pas le CVO“, assure Marcel Razafimahatratra, un sociologue.
Source : AFP