Parler pour en finir avec les agressions sexuelles
Consentement ! Voilà un mot que les partenaires et les prédateurs sexuels devraient avoir à l’esprit. Outre sa charge juridique qui ouvre la voie à des poursuites pénales, le consentement c’est ce qui rend les relations humaines possibles en tant qu’il symbolise ce pacte nécessaire pour agir ensemble dans quel que soit le domaine. Dans les rapports hommes-femmes en Haïti, il devient pourtant un accessoire dont on se passe volontiers pour éviter de perdre du temps et affirmer une domination factice qui témoigne même de la nature de notre société. S’abandonner à la « puissance mâle » devient presque une vertu dans l’espace haïtien et la femme doit obéir aux caprices bizarres d’une fatalité entretenue et ancrée dans les mœurs, les coutumes et même les croyances.
Elles sont construites pour accueillir un discours qu’elles n’ont pas construit et qui les a asservies. Ce discours participe du processus de différenciation de l’espèce humaine propre à toutes les sociétés de domination. Sauf que, dans ce cas précis, il ne prend pas en compte le paramètre racial comme à l’ordinaire, ou du moins ceci est moins apparent. Il est articulé autour du genre ou du sexe érigé comme critère fondamental de cette différenciation vitale à la pérennisation de la phallocratie. La perversion dans cette démarche réside dans le fait même que la femme soit diminuée et agressée en raison de son sexe. Et ces agressions sont une conséquence directe de cette différenciation. Dans cet univers d’enfermement fabriqué pour la gent féminine, la femme se détermine par rapport à l’homme et sa capacité à être mère et/ou épouse. Elle ne serait conséquemment capable de ne laisser aucune trace dans le monde, à moins de se masculiniser. Pourtant, la différence ou la diversité fait la beauté de l’humanité en ce sens qu’il n’existe pas un individu universel. Aussi ne peut-elle constituer une cause de domination.
Dans le fait, il n’est nullement étonnant de voir grandir cette hypocrisie contagieuse des femmes qui maltraitent les femmes, juste par besoin d’identification au genre dit dominant. C’est un épiphénomène de la domination masculine. Voilà ce que la société doit aujourd’hui rebuter. Il faut cependant éviter de faire douter les enfants sur leur identité en faisant de la diversité de genre une émanation culturelle quand bien même la culture aurait influé sur le mode de vie du futur adulte. L’existence du masculin et du féminin constitue une réalité implacable, également non discriminatoire qui ne doit nullement aboutir à une domination de l’un sur l’autre et dans ce cas précis du premier sur le second. Vivre sa féminité ne saurait donc être une imposition de l’autre sexe. La masculinisation de la femme ou la féminisation de l’homme ne résout pas les problèmes de discrimination.
Les violences sexuelles, dans leurs effets, affectent l’humanité dans son ensemble. Si les femmes sont les plus grandes victimes de cette forme de violence, les hommes aussi en souffrent, car participant à la composition de la société, ils ont des sœurs, des femmes… qui pis est, cette forme de violence s’étend à l’être masculin, notamment avec la précarité, et est exercée contre lui tant par les hommes que par les femmes. La journée internationale des droits des femmes ne saurait donc être réduite à une simple « journée des devoirs des hommes pour satisfaire les demandes des femmes », ce qui serait une réaffirmation d’une certaine supériorité masculine néfaste à l’émancipation et l’autonomisation des femmes accessibles dans une perspective plus globale d’élimination ou de reconfiguration de cette forme de société et de socialisation génératrice d’inégalités. Par ailleurs, cette réduction serait aussi une acceptation des fonctions subalternes qui consacrent cette domination et qui constitueraient une justification des harcèlements et des agressions sexuelles.
Il faut agir sur les maux avec les mots, et empêcher que les maux agissent sur nous, grâce à une effusion de mots porteurs de sens qui traverse les complaintes du temps pour exposer dans sa crudité le vécu d’une catégorie d’êtres humains oppressée par l’ordre établi dans une société construite contre elle. La mystification de ces violations c’est indéniablement s’en faire complice, autant que la mainmise sur le féminisme de certaines catégories de gens n’est pas une voie sûre vers l’émancipation des femmes et l’éradication des discriminations. L’expansion du féminisme ne doit pas être en porte-à-faux avec la féminité. Sans tuer la séduction, il faut dénoncer les agressions sexuelles en dépit des obstacles dressés face à la liberté de parole des femmes. Aussi faut-il combattre les incitations à la haine en raison du genre véhiculées à travers la musique et autres canaux médiatiques qui sont des invitations au viol à peine voilées. Elles doivent être dénoncées et bannies, pour éviter tout retournement pervers de transformer en bourreau les victimes, qui devant le tribunal social, se taisent.
Parlons tous ! Finissons avec les agressions sexuelles
Me. Lionel Edouard