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Haïti-Economie: La BRH exige le retrait des transferts en gourdes, la population haïtienne en paie les frais

Dix-huit (18) mois après la mise en vigueur (application) de la circulaire 114-1 de la BRH portant sur les opérations de transferts sans contrepartie qui stipule que « les banques et les maisons de transfert seront tenues de payer les transferts internationaux en monnaie étrangère, si le bénéficiaire reçoit les fonds sur son compte bancaire, ou en gourdes si le bénéficiaire requiert le paiement en numéraire », on tente de déterminer si cette décision a porté fruit mais surtout qui a pu en tirer profit.

Selon la BRH, cette décision a été motivée aussi bien par la rareté de monnaie en dollars que par le versement accru des transferts en gourdes à des taux hors marché par des sous-agents de maison de transfert.

Un an et demi après, cet article montre que cette décision a affecté négativement les couches défavorisées et surtout comment les grandes banques haïtiennes ont pu en tirer profit.

Une analyse comparative des rapports publiés par la BRH sur les résultats cumulatifs des banques d’octobre 2019 à septembre 2020 et de septembre octobre 2020 à septembre 2021 nous a permis de tirer une conclusion très étonnante.

 

CUMUL 2020 (Octobre 19 – Septembre 20)

Montant en Milliers de gourdes

 

CUMUL 2021 (Octobre 20 – Septembre 21)

Variation des gains sur les changes réalisés par ces banques

D’octobre 19 – Septembre 20 et Octobre 20 – Septembre 21

 

En effet, d’octobre 2019 à septembre 2020, la Banque Nationale de Crédit (BNC) a réalisé des gains sur change de 295,205.90 millions contre 209,412.00 millions de gourdes après la rentrée en vigueur de la note, Octobre 2020 – Septembre 2021, soit une diminution des gains sur change de l’ordre de 29%.

La banque Populaire Haïtienne (BPH) a, de son côté, effectué des gains sur change de 12,919.80 millions gourdes avant et 7,452.90 millions de gourdes après, une baisse considérable de -42%.

La Banque de l’Union Haïtienne (BUH) a fait des gains de 237,581.60 millions gourdes avant la mise en application de la note et 144,731.90 millions de gourdes après, une variation négative de -39%.

La Capitale Banque a accumulé des gains de 379,798.00 millions de gourdes avant et 635,218.00 millions de gourdes après, une augmentation de l’ordre de 67%.

La Sogebank a bouclé l’exercice fiscal 2020 avec des gains sur change de 496,004.10 millions de gourdes et 804,539.20 millions de gourdes de gains sur change durant l’exercice qui se termine en septembre 2021, une variation à la hausse de 62%.

La Unibank qui a occupé le premier rang avec des gains de 919,686.60 millions d’octobre 2019 – Septembre 2020 a connu une augmentation considérable de 146% pour réaliser des gains sur change de 2,265,663.90 milliards de gourdes après la rentrée en vigueur de la note de la BRH, d’Octobre 2020 – Septembre 2021.

En interdisant le paiement des transferts en dollars dans les bureaux de transfert, alors qu’il est fort possible que plus de bénéficiaires retirent leur argent dans ces bureaux qu’au niveau des banques, les pauvres bénéficiaires se retrouvent face à un dilemme. Ils reçoivent leur montant en gourdes pour ensuite consommer certains produits et services en dollars. Ce qui représente un manque à gagner et une perte considérable sur leur pouvoir d’achat. Ils retirent leur cash en gourdes pour ensuite acheter du dollars US pour payer leur loyer, les frais scolaires, etc…

En tenant compte du taux d’inflation qui a dépassé les 20% en 2020 pour atteindre 24.6% en novembre 2021 ajouté à la réduflation qui a frappé le pays de plein fouet, une amélioration des conditions de vie de la population Haïtienne n’est pas pour aujourd’hui surtout que l’état ferme la porte à la bonne gouvernance et que la lutte contre la corruption qui représente un obstacle majeur au développement n’est pas à l’ordre du jour.

Cette note de la BRH n’arrange pas les choses pour les couches défavorisées, les bénéficiaires qui retirent leur agent dans les bureaux transferts doivent encaisser ce coup fatal. Non seulement leur pouvoir d’achat a diminué mais ils se retrouvent avec moins de gourdes en main pour effectuer leur transaction. En conclusion, les produits de base sont de plus en plus hors de portés des couches désavantagées.

Alors qu’une bonne partie de la population se trouve pénaliser par l’effet de cette note, bizarrement elle fait l’affaire des grandes banques. Ça leur permet d’avoir non seulement la mainmise sur le dollar mais aussi d’augmenter de façon considérable leurs gains sur change. Le constat est clair cette décision représente une mine d’or pour certaines d’entre elles.

Cette note serait beaucoup plus pertinente et aurait un impact majeur sur la rareté de numéraire en dollars et le versement accru des transferts en gourdes à des taux hors marché par des sous-agents de maison de transfert comme voulait la BRH si d’abord, elle s’était donnée les moyens avec l’accompagnement des autres autorités concernées pour exiger que toutes les transactions se fassent en gourdes et que les prix de tous les produits, les biens et services soient fixés en gourdes partout en Haïti.

Sinon cette note aura toujours comme impact de privilégier les plus riches et de dépouiller les plus faibles.

N.B: Les analyses ne prennent pas en considérations les résultats consolidés des banques.

 

 

Darneley GAZEMAR

Expert en finance internationale 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Lovelie Stanley NUMA

Lovelie Stanley NUMA, Journaliste Écologique et PDG Impulse WebMedias. Coordonnatrice Générale de l'association dénommée "Collectif des Journalistes Haïtiens Engagés pour l'Environnement (CoJHEE). La voix des sans-voix. Le journalisme utile c'est ma passion. Je travaille également pour des médias internationaux.