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Lettre ouverte de la Directrice de Programmation de Radio Vision 2000, Nadeige Cajuste à Diego Charles

À Diego…Mon fils

Tu es né de cette terre et tu es reparti de cette même terre vers une nouvelle destinée.

Tu as pris ton envol,

Si jeune…trop jeune…trop tôt !

Mais c’est ton choix !

Tu es parti rejoindre les autres qui comme toi, ont lutté pour une Haïti Nouvelle.

Et je garde le souvenir de ce beau sourire qui ne regardait pas un chef,

Mais avant tout un guide, une accompagnatrice….

Pour toujours, je n’oublierai pas ce surnom que tu me donnais, pour me dire Bonjour ou

Bonsoir… « Madame Ma Mère » et je répondais « Mon Fils»

Et chaque fois que je passe dans le couloir de la salle des nouvelles,

Je me souviens…

C’était hier encore…tu me regardais souriant et tendre,

Et cela me donnait du baume au cœur et nous aidait à repartir de bon pied face à ces journées parfois si

Longues et si monotones.

Tu étais un pion dans cet échiquier qui désormais ne peut être joué sans être remplacé par un autre.

Et chaque personne est unique ;

Chaque pion d’un échiquier a son rôle à jouer.

Mon garçon,

Je n’ai pas eu le courage de te parler…

Je suis restée dans le silence ces derniers jours, ce qui a sans doute interrogé plus d’un…

Il me fallait être prête pour reprendre le micro et devenir plus forte et comprendre aujourd’hui plus que jamais,

Que La vie c’est aussi la mort.

Que vivre un jour c’est partir un jour.

Nous ne serons jamais prêts pour cet état de fait.

Mais chaque départ à sa douleur,

Et le tient m’a épuisé jusqu’à me sentir vide intérieurement, profondément…

Ce vide d’une jeunesse qui a échappé entre nos mains, que nous n’avons pa su protéger,

Ou sans doute pas su comprendre, écouter, conseiller à temps.

Cette jeunesse partie trop tôt.

Sans avoir eu la chance d’accomplir des choses merveilleuses…qui sait ?

Tu étais à l’apogée de ta maturité et tu commençais à peine à construire ta vie pour forger celle des autres.

Nous comptions sur toi pour que ton futur soit assuré,

Le nôtre,

Celui de ta mère, ta famille inconsolable,

De tes frères et sœurs meurtris

De tes amis désespérés

De ton Amour…

Et de ceux qui comptaient sur toi,

Ceux qui dépendaient de toi,

Ceux qui aujourd’hui sont aveuglés par les larmes et meurtris par la souffrance.

Tu ne savais pas … et pourtant tu demeurais malgré tout et en dépit de tout, un petit garçon docile, qui

apprenait à marcher pour accomplir les rêves de toute une vie.

Tu sais mon garçon,

Cela me fait penser aux disputes sans importance pour un rien,

Aux séparations qui ne valent pas la peine,

Aux souffrances que nous nous infligeons l’un envers l’autre,

À cette perte de temps en quête de pouvoir et de richesse,

À ce manque de spiritualité et méditation qui en fait de compte nous entrainerait vers notre « Vrai Moi » …

Dans ce bas monde,

Tout est éphémère !

Mais nous l’oublions et nous ne profitons pas des belles choses que nous offre gratuitement la vie.

Nous passons sans cesse notre temps à nous lamenter sur notre sort, nous plaindre sans cesse sans savoir… ou sans avoir compris que nous sommes maîtres de notre vie et de notre destinée.

Ou peut-être, le savons-nous déjà sans rien attendre de la vie, sans rien espérer.

Diego, Tu étais là,

Toujours prêt à faire la différence et un peu trop vite.

Tu as sans doute brulé trop rapidement les échelons de ta vie.

Ton ambition sans borne t’a sans doute poussé à franchir l’embonpoint.

Ta passion, ta fougue et ta détermination comme tant de jeunes t’ont rendu aveugle.

Tu voulais avant tout faire la différence, d’une chose peu tant soi-t-elle importante à tes yeux,

Car pour toi, tout ce qui était nouveau… mot, idée, projet germait dans ta tête comme jamais et se

transformait par la suite en un véritable rêve auquel tu t’y accrochais sans ambages….

Tu construisais un monde à toi, ton monde à toi et tu le façonnais à ta manière sans en soupçonner les

obstacles ou les conséquences.

Mon Fils,

Chaque Mère aspire dans sa vieillesse, à voir en fin de compte le fruit de son dur labeur.

Chaque femme aspire à venter sa fierté face à un Être si bien façonné.

Mais chaque femme a aussi ses faiblesses et ne peut pas tout prévoir ou trop espérer.

Sache Diego,

Que c’est douloureux d’enterrer un enfant quand on est mère, quand on est père,

Que le contraire est plus paisible et rassurant, lorsque sur la tombe de ses vieux parents, un enfant

aurait à dire :

« Merci Maman, merci papa »

« Merci pour tout »

« Je penserai toujours à vous et vous serez à jamais fiers de moi ».

Saches mon garçon,

Que le combat demande une plus grande patience mais aussi un savoir-faire habile,

Pour assurer la pérennité de cette lutte.

Sinon…Est-ce que cela en vaut vraiment la peine ?

Saches mon garçon,

Que tout vient à point à qui sait bien attendre… pour bien agir et être victorieux,

Et fêter par la suite cette victoire qui est aussi la nôtre.

Le combat n’implique pas uniquement la volonté, la fougue, la passion, l’ambition, la vision,

Elle nécessite plus que jamais le tact, l’intelligence, la force et l’intégrité.

À quoi bon se battre si ce n’est pour perdre ?

Être un combattant, c’est être prêt !

Ton départ, Diego a secoué le monde entier.

Mais bientôt tu ne seras plus qu’une page tournée,

Tu seras vite oublié car la vie suit son cours.

J’espère que ta disparition servira désormais d’exemple à tous ces jeunes fougueux, qui se croient parfois invincibles, Forts pour n’agir qu’à leur guise, qui se croient parfois invisibles parce qu’ils croient qu’on ne les observe pas.

Mon enfant… « Lorsque tu te bats pour la liberté

Tu commences par perdre la tienne ».

Tout combattant qui s’arrête en chemin n’est plus un guerrier victorieux mais une cible pour tout

adversaire,

Un sacrifice, un martyr face au monde.

C’est la loi de la Jungle !

Mon garçon,

Ton départ désormais nous rend forts

Je n’ai plus rien à te dire Diego

Sinon « Au revoir et à bientôt ! »

Puisse le Dieu tout puissant

T’accompagner dans ce long et pénible chemin,

Où tu te sentiras désormais tout seul ;

Parce que seul tu es né et seul tu partiras.

Cette route que tu as choisie sera longue.

Tu sentiras à ton tour ce vide, ce silence que nous ressentons d’ici-bas.

Tu te demanderas où nous sommes, où tu es.

Qu’est-ce qui se passe ?

Mais il sera trop tard !

Et tu devras recommencer cette nouvelle vie, vers le cheminement spirituel, si Dieu te l’accorde.

…Je le lui demande, je le supplie de te tendre la main pour t’aider à t’en sortir,

Je le supplie de te tendre la main, pour t’aider à voir la lumière et à la suivre.

J’espère ne plus jamais avoir à souffrir autant car ça fait mal, très mal mais il est bien trop tard !

Que ton âme soit aussi légère qu’une brindille de coton dans l’air,

Afin que tu te sentes enfin libéré de ce poids lourd de la vie d’ici-bas,

Et prêt pour un nouvel envol, un nouveau départ.

Je ne pleure plus Diego,

Je sais que tu vas bien,

Sois heureux auprès de notre Père.

Sois prêt à assurer ta nouvelle mission avec plus de fermeté et d’intelligence.

Saches que d’ici-bas ce combat n’est pas terminé !

Et pour toi, une nouvelle vie vient de commencer…

Sois fort ! Et nous serons forts !

Adieu Diego !

Et bon voyage !

 

 

Nadeige Cajuste

Un 14 juillet 2021, en Haïti

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Lovelie Stanley NUMA

Lovelie Stanley NUMA, Journaliste Écologique et PDG Impulse WebMedias. Coordonnatrice Générale de l'association dénommée "Collectif des Journalistes Haïtiens Engagés pour l'Environnement (CoJHEE). La voix des sans-voix. Le journalisme utile c'est ma passion. Je travaille également pour des médias internationaux.