Haïti/Insécurité : Martissant en a marre
Depuis le 1er juin 2021, les groupes armés de Martissant, de Fontamara et de Gran Ravin s’affrontent. À l’instar des seigneurs de la guerre des villages d’Afrique, ils se sont livrés à une guerre sanglante. Cette situation a paralysé complètement toutes les activités à l’entrée Sud de la Capitale.
Ainsi, des milliers d’Habitants ont dû laisser leur toit pour se rendre en province. Ceux et celles qui n’ont nulle part où aller se sont réfugiés/es dans des abris de fortune. Dans des conditions infrahumaines, ils vivent l’enfer au quotidien. Près de 3 semaines après, la situation s’envenime encore. Toute la périphérie de Martissant reste et demeure toujours en état de putréfaction.
Les odeurs des cadavres des victimes collatéraux des affrontements sont dévorés par des porcs et des chiens affamés. Les maisons abandonnées sont pillées et occupées par les bandits. Leurs propriétaires croupissent sous les arbres ou dans le site d’hébergement du Centre Sportif de Carrefour. Leur situation nous rappelle le lucratif commerce triangulaire du 17ème siècle.
Les conditions d’hébergement sont similaires à celles des bateaux négriers. Comme des esclaves, ils sont entassés, tout en dégageant des odeurs nauséabondes qui infectent l’environnement. De plus, l’impact de l’insécurité à Martissant sur les activités socioéconomiques du Pays est d’une valeur estimable.
L’entrée Sud de la Capitale est le Carrefour qui alimente 5 départements qui représentent le grenier du Pays. Pour une population estimée à plus de 4 millions habitants desservie régulièrement Port-au-Prince et le Grand Sud. C’est une fraction importante de l’économie du Pays qui est bloquée.
Les Compagnies Agro-Alimentaires de Port-au-Prince ne peuvent pas livrer leurs marchandises dans les provinces du Grand Sud. Les commerçantes du secteur agricole (Madan Sara) du Grand Sud ne peuvent pas rentrer à Port-au-Prince pour écouler leurs denrées aux marchés de la Croix des Bossales et dans d’autres endroits de la Région Métropolitaine.
C’est une perte démesurée pour le secteur informel et pour les commerçants de Port-au-Prince dans une économie nationale déjà précaire. Les “Madan Sara” sont obligées d’improviser des marchés locaux. Imitant les oiseaux qui font leurs nids n’importe où, elles sont contraintes de se contenter de peu. Certains d’entre elles se sont rabattues sur les marchés publics des communes avoisinantes, notamment Carrefour, Gressier, Léogâne pour écouler leurs produits périssables en dessous du coût estimatif.
Le secteur des transports en commun fonctionne au ralenti au péril de la vie des chauffeurs et des voyageurs risqués à cette fin. L’Education est presque dysfonctionnelle dans les zones de Martissant et de Fontamara. Ecoliers et étudiants qui font le va-et-vient entre Port-au-Prince et les zones assiégées connaissent des difficultés énormes pour suivre leurs cours ordinaires.
C’est une année que l’on pourrait dire gâchée. Les examens de fin d’année ne peuvent pas avoir lieu dans ces zones. Même le Ministère de l’Education Nationale s’est vu obliger de délocaliser les sièges ordinaires des examens officiels de la zone qui auront lieu au tout début de juillet 2021. C’est une situation catastrophique et traumatisante pour la jeunesse scolaire et estudiantine de la zone de Carrefour et des communes avoisinantes.
Concernant la Pandémie de Covid-19 qui bat son plein dans le Pays actuellement, la majorité des centres de Prise en Charge se trouve à Port-au-Prince. Les malades des villes de Province du Grand Sud ne peuvent pas s’y rendre et souvent, ils meurent chez eux. Les bandits ne respectent pas les ambulances. Elles sont soumises à des fouilles et les pillent et prennent en otage leur personnel.
C’est vraiment une situation alarmante. Deux cadavres en putréfaction ont été retrouvés dans une ambulance stoppée par les bandits à Martissant. Le pire, une semaine après cette situation incontrôlable, le Directeur Général de la Police Nationale d’Haïti a fait des déclarations alarmantes. Il a eu le toupet d’avouer que la situation de Martissant dépasse la capacité des forces de sécurité du Pays.
Dangereux aveu d’impuissance, il appelle la population à se révolter. Bref, c’était un vibrant cri de la faillite de l’Etat. Le pire, les gens ordinaires ne peuvent l’interpréter et lui coller la connotation qui lui conviendrait. Des journalistes autrefois très bruyants préfèrent se livrer de préférence au vilain métier de trafic et d’informations comme gagne-pain.
15 jours après, la situation continue de pourrir. Le Président de la République et son Premier Ministre partent en voyage de per diem. Aucun d’eux n’a pensé à faire une adresse à la nation. Ce n’est qu’un signe d’abandon de pouvoir ou de mépris de la nation. Et la population torturée par les gangs armés et décapitalisée par des cas d’enlèvement est livrée à elle-même.
22 jours après, la situation est encore sous le contrôle des bandits, la population est prise en otage. Les chefs des gangs sèment la terreur comme bon leur semble. Le numéro 1 de la Fédération des Gangs armés communément appelé Barbecue de son vrai nom Jimmy Chérisier vient de faire une révélation fracassante. Il a annoncé que le pays est en pleine révolution à travers une vidéo virale sur les réseaux sociaux.
Le Pays est livré pieds et mains liés à la sauvagerie des bandits légaux et à la violence des gangs armés. Le Pays fait face au gangstérisme d’Etat comme mode de gouvernance. Cette salutation rocambolesque résulte de la stratégie machiavélique du cynique Esto Sola. Rappelons que Sola est un ressortissant espagnol. Il est le digne héritier de ses ancêtres, criminels dans le sang, ils brulaient vifs les 1ers habitants de l’ile qui ne voulaient pas être soumise à l’esclavage mortifère. Motivé par cet instinct de criminel patenté, ce Sola peut exhorter Jovenel Moise à organiser n’importe quel génocide pour se perpétuer au pouvoir éternellement. Fermement rassuré du soutien de ces néo colons, tout massacre à l’instar de celui de Lasaline peut passer comme un fait divers.
Aujourd’hui, le mariage de la PNH et le G9 parait être en cours de divorce. Pour preuve, la PNH a déjà signé un partenariat avec des Policiers Colombiens experts en démantèlement des gangs armés. Et ils sont à pied d’oeuvre dans le Pays. Ces derniers viennent tout juste de mener une opération à succès pour démanteler les Gangs armés de Laboule.
Maintenant, on attend pour savoir le sort de G9 et alliés. Combien de temps reste-t-il aux seigneurs de la guerre de Martissant pour théoriser les riverains à leur guise. Les déplacés de la zone ne peuvent pas rester indéfiniment au Centre Sportif de Carrefour. Qui vivra verra. Car la population en a marre de l’insécurité instaurée à l’entrée Sud de la Capitale d’Haïti par la branche armée du pouvoir.
Ulysse Jean Chenet