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Haïti séisme: Déjà 10 ans de mépris, de pillage et d’escroquerie d’Etat…

 

10 janvier 2020- Le 12 Janvier 2010, la terre a tremblé en Haïti. C’est un séisme de 7.3 qui s’abat sur le pays. En quelques secondes, la capitale haïtienne, Port-au-Prince, se transforme en un vaste champ de ruines presqu’indescriptible. On assiste alors à une scène apocalyptique.

Le bilan humain
On recense plus de 300.000 mille morts et autant de blessés. On dénombre aussi, au moins 1.5 million de sans abris, des gens qui ont tout perdu dans le séisme et qui sont devenus des réfugiés dans leur propre pays. Ils vont vivre dans des abris provisoires ou sous des tentes pendant plusieurs mois, voire plusieurs années…

Les cadavres se ramassent à pelleteuse et transportés par camions pour être déversés dans des fosses communes. Lè va-et-vient des camions dure plusieurs jours. Le spectacle des cadavres en putréfaction qui jonchent les rues est insupportable… Les familles des victimes, contrairement à la tradition haïtienne, n’ont pas eu le temps de faire le deuil.

Les amputés d’une ou deux jambes, d’un ou deux bras se comptent par milliers. Les interventions chirurgicales s’effectuent dans des conditions précaires, parfois sans anesthésie; l’important, c’est de sauver une vie.

Pertes matérielles
Sur le plan matériel, les dégâts sont considérables. On estime à près de cinq-cent mille, le nombre de résidences détruites ou endommagées par le tremblement de terre. Près de 2000 établissements scolaires, plus de 50 hôpitaux et de centres de santé sont affectés et inutilisables. Le palais National, le siège du Parlement, le Palais des ministères, et autres bâtiments publics sont détruits. Les dégâts et les pertes sont estimés à environ 14 milliards de dollars américains, soit presque le double du produit intérieur brut (PIB) du pays en 2009.

Dans le désordre et la confusion, les haïtiens commencent, avec des moyens rudimentaires, plus que dérisoires, à fouiller les décombres pour tenter de sauver des vies. Plusieurs milliers de personnes se retrouvent coincées sous les décombres pendant plusieurs jours. Lorsque les premiers secours arrivent de l’étranger avec les moyens adéquats, leur premier souci fut de dégager les ressortissants de leurs pays respectifs pris au piège, avant de se pencher sur le sort des autres. Les opérations de secours ont duré plusieurs jours. On extrait plusieurs dizaines de personnes des décombres. Des gens survivent plus de deux, voire trois semaines avant d’être secourus miraculeusement.

Solidarité internationale
Pour la première fois dans toute l’histoire, Haïti retient quasiment l’attention de l’ensemble de la communauté internationale. L’aide afflue de partout. Le monde est au chevet d’Haïti et apporte son aide pour répondre aux besoins humanitaires pressants du pays. La solidarité internationale se met en place. On distribue de l’eau, des plats chauds, des tentes, des kits hygiéniques, etc.

L’aide financière
Le 31 Mars 2010, les représentants de 150 pays, d’organismes internationaux, d’organisations non gouvernementales, de la société civile, de la diaspora haïtienne et du secteur privé haïtien, se réunissent au siège des Nations-Unies, à New-York pour collecter des fonds en vue de supporter l’effort de reconstruction du pays. A l’issue de la conférence, c’est une aide financière massive qui a été annoncée à Haïti. Cette conférence internationale des bailleurs internationaux a permis de récolter 9.9 milliards de dollars de promesses d’aide à Haïti pour son relèvement sur le court et le long termes. De ce montant, au moins 5.3 milliards de dollars, ont été promis pour deux années, 2010/2011 et 9.9 milliards pour les trois prochaines années. Ce montant devrait non seulement contribuer à répondre aux exigences humanitaires, mais aussi à la reconstruction du pays.

En fait, la communauté internationale s’engage à soutenir Haïti sur le long terme: “Notre appui ne sera pas de courte durée; nous nous engageons à soutenir Haïti jusqu’à ce que ce pays réussisse à mener à son terme l’effort de reconstruction ( point 12 du communiqué final de la conférence des bailleurs).” Le gouvernement haïtien estime à 11.5 milliards de dollars le montant nécessaire pour la reconstruction du pays. Toutefois, c’est la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti (CIRH) qui est chargée de conduire la reconstruction.

Jusqu’en 2012, 53% , soit 2.38 milliards des 5.3 milliards promis pour entamer la reconstruction d’Haïti, a été décaissé. Ces fonds proviennent majoritairement de 24 pays et institutions financières internationales qui avaient promis des sommes dépassant les 200 millions de dollars. L’argent est géré par le Fond pour la Reconstruction d’Haïti (FRH). Les projets sont identifiés et approuvés par la Commission Intérimaire pour la Reconstruction d’Haïti (CIRH), si le président de la République ne s’y oppose pas, ils sont envoyés au FRH pour financement.

Cependant, on ne s’est toujours pas exactement les montants qui ont été mobilisés et décaissé véritablement des 10 milliards de dollars promis à Haïti. Et au moment où on commémore les dix (10) ans du séisme dévastateur du 12 janvier, l’œuvre de reconstruction d’Haïti demeure toujours peu visible. Les réalisations sont discrètes. Le bilan des réalisations est particulièrement maigre. Bizarre!

Il est vrai que quelques bâtiments publics ont été reconstruits, mais le Palais National et le Palais Législatif restent toujours à terre. De l’argent (10 millions us) pour la reconstruction du siège du parlement a été décaissé en vain. Le parlement continue d’être logé dans un abri provisoire.

Pas même un mémorial n’a été érigé en mémoire des victimes. Les survivants continuent de vivre dans des conditions abjectes dans des camps dépourvus des infrastructures de base. La situation de ces gens n’attire plus personne. Ni l’Etat ni les organisations non gouvernementales (ONG).

Les dirigeants ne font jamais de différence entre les rares projets réalisés dans le cadre de la reconstruction financés par la CIRH ou par le programme Petrocaribe qui totalise près de 5 milliards de dollars. Le flou est total. Dix ans après le séisme du 12 janvier 2010, Haïti continue d’offrir l’image d’un pays dévasté par plusieurs années de guerre. En réalité, au-delà des vies perdues et des pertes matérielles, Haïti commémore déjà 10 ans de mépris, de gaspillage et d’escroquerie d’Etat.

Francklyn Bien-Aimé Geffrard
Journaliste indépendant
10 janvier 2020

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Lovelie Stanley NUMA

Lovelie Stanley NUMA, Journaliste Écologique et PDG Impulse WebMedias. Coordonnatrice Générale de l'association dénommée "Collectif des Journalistes Haïtiens Engagés pour l'Environnement (CoJHEE). La voix des sans-voix. Le journalisme utile c'est ma passion. Je travaille également pour des médias internationaux.